Italie : Monti, le retour de la « baleine blanche » ?

Au temps de sa splendeur, au siècle passé, lorsque la Démocratie Chrétienne régnait en maître omnipotent sur l’Italie, on l’avait baptisée la « baleine blanche ». Mario Monti et sa coalition du centre-droit vont-ils ressusciter le cétacé ? D’une certaine manière, c’est la crainte qu’exprimait Eugenio Scalfari dans son éditorial dominical de « La Repubblica »[[ http://www.repubblica.it/politica/2012/12/30/news/professore_non_rifaccia_la_dc-49658957/?ref=search]]. « S’il vous plaît Professeur, ne refaites pas la DC » suppliait Scalfari qui notait la rapide évolution de Monti depuis que sa « montée » en politique semblait se muer en « une descente dans l’arène ». [[Le contexte politique et historique est évidemment totalement différent. Si l’idéologie « DC » a encore une influence non négligeable au sein de différentes formations, sa reconstitution en tant que telle n’est pas envisageable. Et puis, comme le notait un observateur, dans la DC, il y avait une aile gauche…]]


Le retour de la « baleine blanche » ?

En quelques jours à peine, sur le discours politique en faveur de l’austérité et des réformes montiennes venaient, en effet, se greffer les premières manœuvres politiques de l’ancien premier ministre et de certains de ses ministres « techniques » en compagnie de leurs alliés du centre droit (UDC de Casini, FLI de Fini et Liste Civique de Montezemolo, l’ancien patron des patrons italiens). Evolution inexorable à partir du moment où Monti s’affirmait comme chef de cette coalition et candidat à sa propre succession. Même sans être formellement candidat, le Professore ne pouvait naturellement plus se prétendre au dessus des partis. Et d’ailleurs, pour le Parti démocrate, Pier Luigi Bersani demandait à Monti de clarifier sa position et de dire s’il se considère comme une alternative au PD, si le centre gauche est pour lui un adversaire ou si des formes de collaboration sont possibles. Pour l’instant, Mario Monti esquive et se contente de renvoyer à son programme. Mais l’engagement politique de Monti risque de rendre plus délicate la perspective d’un gouvernement d’union national [[voir ma chronique précédente.]]


A la « montée » en politique succède « la descente » dans l’arène

Les programmes des deux centres, droit (l’ « agenda Monti ») et gauche, ont certes de nombreux points communs sauf sur les questions – importantes- de la redistribution des revenus et du marché du travail. Théoriquement ils ne sont en tous cas pas incompatibles et permettraient sans doute la constitution d’un gouvernement de coalition. Mais les péripéties de la campagne électorale peuvent le compromettre. Le centre-gauche – et la gauche- auront-ils, dès lors, la possibilité et la volonté de proposer une véritable alternative ? C’est peu probable étant donné le positionnement du PD et le rapport de force politique actuel. La bataille pour le gouvernement se déroulera désormais entre les deux centres pendant que Berlusconi – omniprésent dans les médias- et le mouvement de Beppe Grillo se disputeront le champ de la démagogie populiste. Cette brève campagne électorale (on votera les 24 et 25 février) reste ouverte et peut encore réserver son lot de surprises. Les chancelleries occidentales, la Commission européenne et le Vatican ont, en tous cas, déjà voté Monti. Le FMI et la BCE ne choisiront pas un autre bulletin de vote. Il ne manque que l’imprimatur de Goldman Sachs, l’employeur précédent de Mario Monti. Ces soutiens unanimes des classes dirigeantes européennes sont édifiants. Celui de la grande presse nationale (Le Soir encore cette semaine) et internationale ne l’est pas moins. Le discours de ce beau monde a parfois des accents insupportablement condescendants à l’égard de ce peuple italien dont les commentateurs se disent mezzo voce qu’il n’est tout à fait sûr qu’il votera « bien »….

PS A vous lecteur fidèle ou impromptu de cette chronique, des vœux pour une année 2013 politiquement riche en réflexions et en actions.

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