Italie : la scène politique comme une farce tragique

« L’histoire ne se répète pas, elle bégaie » : la phrase attribuée à Marx risque bien d’être de mise au lendemain des élections italiennes du 4 mars. À une semaine du scrutin, les sondages se sont tus, mais les dernières vagues confirmaient la tendance générale : une forte abstention (jusqu’à 30 %), une prédominance de la coalition de droite — radicalisée — menée par Berlusconi (Forza Italia, Lega et Fratelli d’Italia) aux alentours de 35 %, un M5S premier parti d’Italie, mais isolé avec plus de 27 % et le PD de Renzi (centre ex-gauche) avec un petit 21/22 %. La gauche alternative de Liberi e Uguali (LeU) avec moins de 10 % (entre 6 et 8) tandis que la gauche radicale de PAP (Potere Al Popolo) ne figurait pas dans les sondages et, sauf grosse surprise, n’atteindra pas le seuil électoral de 3 %

contre le racisme et le fascisme

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Le nombre élevé d’indécis laisse planer un doute sur l’issue finale, mais la loi électorale est ainsi (volontairement) faite que la seule quasi-certitude est qu’il n’y aura pas de vainqueur. Cela laisserait la place à deux hypothèses : un gouvernement prolongé pour Paolo Gentiloni et de nouvelles élections à court terme ou les fameuses « larghe intese » (grande coalition) qui regrouperaient Forza Italia (sans ses alliés) et le PD. Les deux partenaires potentiels jurent qu’il n’en est pas question, mais rien n’est impossible dans le cadre politique italien actuel. Outre le projet politique qu’elle porterait, cette entente aurait un effet désastreux sur une opinion qui verrait des partis prendre des décisions exactement contraires à leurs discours électoraux. À droite, un combat serré se poursuit pour la direction de la coalition (et l’éventuel poste de Premier ministre) entre Berlusconi et Salvini qui a transformé la Lega de parti sécessionniste en formation « nationale » d’extrême-droite. On n’ose imaginer l’Italie conduite par le revenant Berlusconi (qui, s’il est inéligible, peut toujours prétendre au poste de président du conseil) ou par un leader d’extrême-droite dont la virulence xénophobe a peu d’équivalent en Europe. Mais le vent de droite qui souffle sur la péninsule laisse planer tous les doutes.

Salvini le rosaire à la main

Hier, la campagne s’est déplacée dans la rue pour deux manifestations emblématiques. À Rome, à l’appel de l’ANPI (Associazione Nazionale Partigiani d’Italia) et de très nombreuses organisations dont tout le mouvement syndical, la gauche et le PD cohabitaient le temps d’un cortège contre le fascisme et le racisme. La manifestation massive faisait suite à l’attentat raciste de Macerata où un néo- nazi (membre de La lega) avait ouvert le feu sur des migrants.[1] Les Cinque Stelle étaient absents. Ce qui n’a rien d’étonnant quand on voit, notamment, leur position sur la question migratoire. Pendant ce temps, en guise de réponse à la démonstration antiraciste, la Lega manifestait à Milan sous la bannière « Les Italiens d’abord ». Pour clôturer sa campagne, et comme pour anticiper sa victoire Matteo Salivini, le rosaire à la main et muni à la fois de la Constitution et des Évangiles a juré fidélité à « son peuple d’Italie ». Cette image du dirigeant de la Lega comme celle d’un Berlusconi ressassant ses saillies à la télévision restent comme le symbole de cette campagne. Quand la scène politique italienne a pris l’allure d’une farce tragique et désespérante.

[1] Voir le Blog-Notes du 7 février

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