La haine de classe : vous n’avez pas connu, vous avez oublié, vous ne saviez pas que cela existait – ou alors, oui sans doute, réminiscence historique du XIX ou du début du XX siècle. Et pourtant, là, aujourd’hui, devant nous elle s’étale. Arrogante, agressive, oppressive, elle envahit tous les médias. Dans la presse populaire comme celle dite de référence : haro sur le peuple grec, Syriza, Tsipras («le meilleur ennemi de lui-même » selon Notre Dame de l’Austérité-à visage-humain). Du Nord au Sud, de l’Ouest à l’Est, une guerre idéologique – sans doute la plus violente dans l’histoire de l’Union Européenne – est menée sans merci. Il faut abattre le gouvernement grec. Ne pas laisser le minime espoir aux peuples européens qu’une autre politique est possible (quoi qu’en disent les économistes libéraux les plus lucides). Il faut tuer l’alternative par n’importe quel moyen : le mensonge, le chantage, la menace, le mépris.
La peur de la contagion -espagnole pour commencer- : voilà le spectre qui hante l’Europe de la pensée dominante sous toutes ses variantes, libérales, démocrates-chrétiennes ou sociales-démocrates. Le chœur des procureurs – les socialistes Shultz, Dijsselbloem et Moscovici, le chrétien démocrate Juncker et le libéral Michel (celui qui veut siffler la fin de la « récréation »),sans oublier les organisations patronales : voilà l’union sacrée qui s’appuie sur les échecs historiques du FMI, fabricant de crises planétaires à répétition depuis un demi-siècle. Tsipras avait donné des gages et fait des concessions (qu’il aurait eu du mal à faire accepter par son parti et sa majorité) mais cela ne suffisait pas à Lagarde, Merkel, Hollande et consorts : il fallait le casser, lui et ce qu’il représente aux yeux de ceux qui pensent à une autre société. Voilà le véritable enjeu du referendum en Grèce.
La dette n’a strictement aucune importance. L’Europe mène une politique punitive contre le gouvernement grec, contre une « colonie en révolte ». La suprématie du marché est en jeu. Jamais depuis 1989 et la chute du mur de Berlin, l’enjeu politique n’a été aussi important pour l’avenir des peuples européens. Notre sort se joue dimanche en Grèce.