L’internationale et l’austérité

Une nouvelle internationale est née. Précision : historiquement l’Internationale évoque l’organisation du mouvement ouvrier, socialiste et jadis communiste. Symboliquement l’Internationale est d’abord l’hymne de ce mouvement ouvrier. Il paraît qu’on le chante encore dans nos congrès socialistes qui adoptent à l’unanimité des programmes de rigueur, déjà précédemment avalisés à la même unanimité par les libéraux. Attention tout de même car à force de voir des ministres socialistes – à l’exception notable du premier d’entre eux – lever le poing en clamant « Foule esclave, débout, debout », il risque d’y avoir des surprises. Déjà que les « foules esclaves victimes de l’austérité » ont tendance à descendre dans la rue sans les encouragements venus d’en haut, où va-t-on ? Trêve d’ironie mal placée.

C’est vrai, une nouvelle internationale nous arrive. Celle qu’Angela Merkel tente d’imposer aujourd’hui à Bruxelles. L’internationale de l’austérité. « Le monde va changer de base », disait le chant révolutionnaire écrit durant la Commune de Paris. Le monde a changé de base. L’austérité est désormais le programme commun de Berlin à Rome, de Paris à Madrid et de Lisbonne à Bruxelles sans parler d’Athènes bien entendu. Avec des nuances dans les sacrifices imposés aux populations, je vous l’accorde mais des sacrifices qui, de toute façon, touchent les plus fragiles et épargnent les plus nantis. « Sacrifice » cette parole indicible qui, l’autre soir à Rome, n’arrivait pas à sortir des lèvres d’Elsa Fornero, la nouvelle ministre italienne des affaires sociales et se muait en larmes sur un visage frappé de stupeur et de douleur par ses propres annonces.


Elsa Fornero : les mots et les larmes

Austérité et sacrifice, voilà désormais la règle d’or d’une Europe qui s’obstine dans une voie pourtant condamnée par les plus incontestables économistes, y compris libéraux. Ceux-ci ont beau répété dans toutes les langues que non seulement cette politique ne permettra pas de sortir de la crise mais qu’elle ne fera que l’aggraver, rien n’y fait. Obéissant aux dogmes de la BCE et aux injonctions du marché, l’Europe s’enfonce dans la récession. Jamais sans doute depuis la planification la plus rigide de la défunte Union soviétique, on n’avait vu une économie aussi prisonnière de l’idéologie. Mais attention car l’Internationale le clame aussi :

« L’État comprime et la loi triche, dit le chant
L’impôt saigne le malheureux ;
Nul devoir ne s’impose au riche,
Le droit du pauvre est un mot creux.
C’est assez languir en tutelle,
L’égalité veut d’autres lois :
« Pas de droits sans devoirs, dit-elle,
Égaux, pas de devoirs sans droits ! »

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