Le temps des réactions épidermiques et incantatoires des multiples prétendants à la victoire est passé. Celui de la déception pour les vaincus le sera un peu plus tard. Les premières analyses de transferts de voix, toujours incertaines (avec des critères souvent discutables) ont cependant apporté leur lot d’enseignements. Il faudra affiner mais il apparait bien qu’Ecolo ait perdu à la fois sur sa gauche et un peu plus sur sa droite. Ce qui pourrait être une conséquence du « centrisme vert » adopté par les directions écologistes de ces dernières années. Par ailleurs, les chiffres tordent le cou à la campagne électorale ressassée par la gauche de gouvernement affirmant que le PTB divise et affaiblit la gauche. Certes des électeurs écolos et socialistes qui refusent (notamment) les politiques d’austérité se sont reportés sur la gauche de la gauche. Mais l’érosion socialiste profite d’avantage au MR. Et il est probable que l’alternative PTB a, au contraire, permis d’éviter l’abstention et le repli des citoyens les plus touchés par l’austérité et les plus découragés par l’absence de volonté politique de les combattre.
Certes, dans le rapport de force global l’ensemble des voix de gauche est en régression mais l’émergence du PTB au niveau parlementaire est une nouvelle donne importante du paysage politique. C’est la première fois, depuis 30 ans, que des élu-e-s de la gauche de la gauche se retrouvent dans les assemblées et qu’une voix réellement différente pourra se faire entendre. Ils bénéficieront d’une nouvelle visibilité et des moyens financiers non négligeables pour organiser leur action. Les élu-e-s PTB veulent être le relais des mouvements sociaux. Cela semble assez évident sur le terrain des luttes sociales traditionnelles, pour d’autres matières, comme les luttes environnementales ou féministes, par exemple, il faudra faire ses preuves et affronter quelques contradictions. Ils seront aussi, ont-ils précisé, les « sentinelles » par rapport au catalogue de promesses « de gauche » qui ont fait florès dans les derniers jours de la campagne. Le PS, en particulier, a annoncé que « si il est au gouvernement », il garantira la Sécurité sociale, instaurera un impôt sur les grandes fortunes et augmentera pensions et allocations (entre autres)…. Sans illusions, il ne sera pas inutile de rappeler chacun à ses engagements. Et puis surtout, face aux nouvelles politiques d’austérité que dessinent les traités, la future Commission (quelle que soit sa composition) et les gouvernements européens (avec ou sans le PS au gouvernement fédéral), la présence des parlementaires PTB pourra participer à l’organisation d’une résistance contre ces politiques.
A ce propos, se pose aussi la question de l’avenir de la politique d’ouverture adoptée par le PTB et qui a contribué sans nul doute (même si c’est dans une mesure difficilement appréciable) au succès de ces listes. Pour rappel, le « GO » (pour « Gauche d’ouverture ») regroupait des syndicalistes, des personnalités indépendantes [[Dont l’auteur de ce texte]], des militants associatifs et culturels, des intellectuels et d’autres partis de gauche (LCR et PC). Ce rassemblement – bien informel et sans véritable plateforme politique- a joué son rôle. Peut-il avoir une suite ? Cela dépendra du PTB lui-même qui doit d’abord prendre ses marques dans ses nouveaux habits politiques et poursuivre le débat sur son propre avenir. Mais aussi des différents acteurs de l’ouverture qui auront à se définir, et, le cas échéant, à réfléchir sur les éventuelles pistes à suivre pour renforcer demain une dynamique de la gauche de la gauche que l’on peut envisager désormais hors des concurrences électorales.
Par ailleurs on observera de près, les choix d’Ecolo de retour dans l’opposition. Le débat, sans doute animé, qui ne manquera pas de s’installer chez les Verts devrait, à termes, redéfinir leur positionnement politique.
L’hypothèse d’ une suite à « la gauche d’ouverture » n’est pas incompatible, bien au contraire, avec le développement d’un dialogue entre tous ceux qui se reconnaitront, notamment et principalement, dans la lutte contre les politiques libérales, quelle que soit la spécificité des projets politiques de chacun.
« Il y a des rendez-vous à ne pas manquer » disait l’appel à voter en faveur des listes PTB-GO. D’autres rendez-vous ne sont peut-être pas impossibles. Ce sera, en tous cas, un élément important à observer dans l’évolution du champ politique de la gauche.
PS Ce texte n’engage pas « Politique », revue de gauche pluraliste où d’autres points de vue s’expriment également. Il conclut, par ailleurs, pour ce qui est du Blog-notes, mon engagement personnel dans le débat (post-)électoral.