Pour la gauche française ces élections régionales marquent indéniablement une étape historique. Il y a bien sûr l’ampleur de la victoire avec un rapport de force favorable qu’elle n’avait plus connu depuis 1981 et la victoire de François Mitterrand. Mais au-delà de ce succès, et à travers lui, c’est la structuration de la gauche qui vit un changement fondamental. Pendant pratiquement 40 ans, depuis son congrès d’Epinay, le PS a vécu sous le signe de l’union de la gauche avec le PCF. Parallèlement au déclin communiste et à l’épuisement du modèle social démocrate, on a vu surgir et croître la sensibilité écologiste. De l’union de la gauche on est passé avec Lionel Jospin au concept de « gauche plurielle » où se retrouvaient toutes les composantes d’une gauche encore dominée par le PS.
Aujourd’hui, nouvelle étape historique : l’axe principal de la gauche est désormais un axe PS/Ecologiste auquel s’ajoutent les restes du PCF allié au Parti de Gauche. Et cela s’appelle désormais « la gauche solidaire » où il est moins question d’une force hégémonique que d’un rassemblement des diversités. Les résultats de dimanche dernier l’ont démontré avec éclat : la structuration bipolaire gauche/droite de la vie politique française reste plus que jamais d’actualité mais sous de nouvelles formes internes. La gauche est en mesure de reconstruire un pôle majoritaire au-delà des élections locales.
Mais pour y arriver, elle a encore du chemin à parcourir. Il lui faut mettre au point un projet politique crédible face à la crise et éviter de retomber dans la guerre des clans et des chefs. C’est vrai d’abord pour le PS dont on connaît les faiblesses de ce point de vue mais ce l’est aussi pour les écologistes qui doivent structurer un mouvement encore hétéroclite. Daniel Cohn Bendit propose une nouvelle forme d’organisation, plus souple, une sorte de « coopérative politique ». Là aussi les débats seront âpres. Mais les électeurs de gauche qui ont retrouvé espoir ne comprendraient pas que leurs représentants n’arrivent pas à confirmer leur unité. Avec la reconquête des classes populaires réfugiées dans l’abstentionnisme, c’est évidemment la condition d’un succès lors de la présidentielle de 2012.