Cette fois on ne peut plus esquiver, éluder ou ergoter sur les accidents de parcours du capitalisme financier. Les masques sont tombés, grimaçants. Le navire fait eau de toute part. Les banques d’abord : des mesures circonstancielles même radicales autorisent le sursaut mais ne permettent pas de régler les problèmes de fond. C’est désormais toute l’activité économique qui est danger. Déjà les crédits manquent, des industries fonctionnent au ralenti, la récession est bien là dont on ne mesure pas encore toutes les conséquences. Tableau apocalyptique, catastrophisme : qui peut encore le dire ? L’Etat tant vilipendé par les fauteurs de crise tente de colmater les brèches. Il faut maintenant réévaluer sa place et ses responsabilités dans l’ensemble du système, tout comme il faut remettre en question les méthodes et les fins du capitalisme. Il ne s’agit plus simplement de revoir les mécanismes de régulation ou d’ajuster le système aux marges. L’avenir de l’humanité exige un véritable aggiornamento. Rien de moins.
On s’est gaussé de l’incapacité, de l’impuissance ou même de l’absence de volonté de L’Europe face à la crise. Replis et égoïsmes nationaux resurgissent en temps de crise : c’est classique mais il y a plus grave. Démantèlement des services publics, concurrence à outrance, obstacles aux aides d’état, orthodoxie budgétaire jusqu’à l’aveuglement : depuis près de trois décennies, la Commission Européenne est devenue le temple du fondamentalisme de marché, plus rigide encore dans son libéralisme que le gouvernement des Etats-Unis. Mais cette politique ne vient pas de nulle part, elle n’a pas été décidée dans le secret d’on ne sait quelle alcôve. Cette politique européenne est le fruit du consensus de longue date et de pratiquement tous les gouvernements nationaux du continent qu’ils soient de droite, de gauche ou de coalitions diverses. Au nom de la suprématie définitive du marché, tout autre discours a été discrédité et voué aux gémonies.
Aujourd’hui personne ne peut dessiner le visage de l’avenir mais pour qu’il ne porte pas les stigmates du malheur collectif, il faut affronter une remise en question sans précédent. Cela doit être le rôle du et de la politique dont on vient tout coup de se rappeler qu’elle était bien le premier et le dernier recours face aux errements du marché.