Le 24 septembre dernier, Manuel Valls avait décrété « l’impossibilité pour les Roms (sauf quelques familles, avait-il précisé) de s’intégrer ». En toute logique, le ministre de l’Intérieur a donc fait sortir une jeune fille de 15 ans d’un bus scolaire pour l’expulser au Kosovo en compagnie de sa famille. Une jeune fille scolarisée depuis 4 ans dans le Doubs… preuve évidente de son incapacité à s’intégrer ! Indignation chez une partie des socialistes qui n’ont pourtant jamais remis en cause la politique de Manuel Valls, politique qui est aussi – jusqu’à preuve du contraire – celle du président de la République. Approbation (par voix de sondages) d’une majorité de Français. Félicitation de la droite et de l’extrême droite qui fait son miel du discours sécuritaire et répressif des plus hauts représentants de la majorité. Colère des lycéens et des étudiants qui descendent dans la rue et finissent par inquiéter François Hollande qui se souvient de l’impact potentiel d’une jeunesse contestatrice.
Hollande n’a pas oublié les ennuis de Chirac, en 1986, avec les lycéens qui s’opposaient à la réforme universitaire du ministre Devaquet ni ceux de Villepin, en 2006, avec le Contrat de première embauche (CPE). Deux projets que les manifestations étudiantes avaient fait capoter. Samedi, donc, François Hollande endossant les habits de Salomon, tente de calmer le jeu et annonce que Leonarda, la jeune fille expulsée, pourrait revenir en France poursuivre ses études, si elle le souhaite mais sans sa famille définitivement expulsée. Mais la jeune fille refuse ce choix. Manuel Valls salue le « geste de générosité » présidentiel et assure qu’il ne changera pas de cap. Le ministre de l’Intérieur profitant de l’occasion pour faire état de son « tableau de chasse » et indiquer qu’avec le gouvernement socialiste on expulse davantage que sous l’époque Sarkozy.
La décision présidentielle n’aura pas calmé la grogne au PS. Et la droite se déchaine à l’image de l’ancien ministre et député UMP Bruno Lemaire qui s’écrie : «Honte à François Hollande de faire passer les revendications minoritaires avant les intérêts de la majorité des Français! Honte à lui de contourner les lois de la République ». Bref, au-delà de la question de fond et de la calamiteuse politique migratoire de la gauche française, la gestion politique et médiatique de l’affaire Leonarda promet encore quelques sueurs froides dans les allées du pouvoir. « Le changement, maintenant » proclamait le candidat socialiste en 2012. « Le changement dans la continuité », revendiquait Giscard en 1981. Avec Hollande, et son ministre de l’Intérieur, c’est donc « la continuité sans le changement »…