Sans forfanterie, on pouvait raisonnablement considérer que la victoire de Donald Trump était de l’ordre du possible et même du prévisible. L’aveuglement des médias et des sondeurs, tout à leur monde, …crevait les yeux. Comme, d’une certaine manière, lors du referendum français de 2005 sur la constitution européenne. On doit s’interroger avec effroi sur la victoire d’un candidat raciste, xénophobe, sexiste, complotiste, ultraconservateur dans tous les domaines et sans la moindre expérience élective. On ne peut encore en mesurer toutes les conséquences sur le plan social, sociétal ou international. Mais elle parle de l’état d’une société.
Les faits sont là, près de 58 millions d’électeurs américains [[A noter qu’en termes de voix, la différence entre les deux candidats n’est pas spectaculaire : 57.185.223 voix pour Clinton et 57.823.858 pour Trump]] ont donc choisi Trump dont la victoire n’est pas seulement redevable à la droite et à son extrême, à l’électoral blanc et chrétien ou aux « cols bleus » les plus touchés par la crise mais à une coalition d’électeurs comprenant aussi des femmes, des latinos et des afro-américains et d’une manière générale à des secteurs entiers d’exclus de toutes sortes de la mondialisation.
En fait, tous ceux qui ne pouvaient plus se reconnaitre dans la candidature de « l’élite » qui incarnait toute à la fois, le clan, l’héritage, l’affairisme et l’arrogance (après- avoir dénoncé les électeurs « déplorables » de Trump, Clinton n’a pas pris la peine, après sa défaite, de remercier les « déplorés » de son camp) se sont tournés vers Trump. Paradoxe immense de l’histoire (mais il y a des précédents…), le milliardaire recueille le soutien de ses propres victimes qui le seront doublement par sa politique sociale, notamment.
Ici et là, la droite libérale classique, la gauche-droite sociale libérale semble incapable de mesurer le rejet dont elle est l’objet dans sa défense d’une société de plus en plus totalitairement inégalitaire. En fait, autre paradoxe, la victoire de Trump, est le signe supplémentaire d’une crise sans précédent du modèle capitaliste contemporain. Dans un désarroi extrême et un triomphe apparent, il incarne aussi l’impasse d’un système. Avec quelques années de retard, il est sans doute sur le plan politique, l’ombre portée de la crise des subprimes.