Ceta : Une victoire et des menaces

Ne boudons pas notre plaisir ! Ce n’est pas tous les jours que l‘on peut se féliciter du bon fonctionnement de notre démocratie, que l’on peut se réjouir de voir la politique retrouver ses droits et la gauche enregistrer une victoire. Car c’est bien de tout cela qu’il s’agit avec le vote du Parlement Wallon refusant la signature du traité de libre-échange avec le Canada. Les observateurs les moins favorables à ce vote ont bien dû souligner que le débat au parlement wallon avait été un modèle du genre. La victoire des adversaires du CETA est aussi celle de millions d’Européens qui ont manifesté contre le traité au cours des derniers mois. Et en Belgique, comme ailleurs et peut-être plus qu’ailleurs, la société civile s’est emparée de la question d’une manière tout fait remarquable.

La manifestation qui s’est déroulée à Bruxelles, le 20 septembre dernier, a été, de ce point de vue particulièrement significative. Elle avait été organisée par une coalition inédite [[en fait cette coalition a commencé à voir le jour dès mai 2015]] qui regroupait des partis, les syndicats, les mutualités le mouvement associatif au sens le plus large ( on y retrouvait aussi une organisation de défense des consommateurs, comme Test Achat qui appelait à descendre dans la rue ), des représentants du monde agricole et des classes moyennes. Du jamais vu ! Le rejet du libre échangisme à tout crin, de la dérégulation des normes de consommation et de production, les atteintes à l’écologie et à la santé, le refus de toute puissance des multinationales et des tribunaux d’exception qu’elles voulaient instaurer : voilà ce qu’un nombre considérable de citoyens organisés ou non a voulu signifier. Il est rare et difficile de constituer un tel rassemblement qui dépasse et de loin les « opposants traditionnels » à l’ultra libéralisme. Une manifestation ne fait pas le printemps mais il faut en retenir la leçon.

Encore fallait-il que les partis traditionnels du centre gauche et du centre tout court entendent le message et en tirent les conclusions sur le plan politique. Ce n’était pas gagné d’avance d’autant que le PS quand il était aux affaires au cours de la législature précédente avait approuvé les mandats de négociation du traité TTIP. On ne peut que se réjouir de cette évolution. Elle est aussi, sans doute, le résultat d’une modification des rapports de force. Ne soyons pas naïfs : le PS avait besoin de redorer le versant gauche de son identité et les succès sondagiers du PTB ne sont sans doute pas non plus étrangers à cette évolution. Pour le CdH, la question est différente et toujours plus complexe à saisir (le centrisme a ses propres lois…et la présence du monde agricole a sans doute influencé le choix politique ). Mais finalement si une large majorité parlementaire s’est dégagée à Namur, c’est aussi fondamentalement parce que les partis traditionnels ont, cette fois sans tergiverser, relayé un mouvement social qui a réussi à imprégner la société.


Photos HLP

Il faut cependant demeurer vigilant. La pression qui s’exerce déjà sur le gouvernement wallon et qui ira en s’accentuant dans les prochains jours est énorme, tant au niveau belge qu’européen. Déjà les noms volent : soviets, goulag, dictature du prolétariat…. Et tout sera mis en œuvre, le chantage, les grandes manœuvres et les petites entourloupes, pour passer outre la sanction démocratique ou forcer le gouvernement wallon à déjuger sa propre majorité. La semaine à venir sera cruciale. Plus que jamais la mobilisation de la société civile sera déterminante.

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