Aujourd’hui ce ne sont plus seulement quelques économistes éclairés qui le disent. Mais la plupart d’entre eux, comme l’écrasante majorité des observateurs et des journalistes spécialisés, de plus en plus de responsables politiques européens l’affirment avec fermeté : la Banque centrale européenne doit intervenir et doit jouer son rôle de préteur en dernier ressort pour les États en difficultés comme elle l’a fait pour les banques.
Il ya quelques jours, le ministre polonais des finances résumait la situation dramatique que nous vivons : « L’alternative est la suivante : soit une intervention massive de la BCE, soit la catastrophe ». Aujourd’hui tous les pays de la zone euro sont touchés, quel que soit l’état de leur économie. Et même l’Allemagne est visée.
On a mille fois expliqué ce mécanisme de spéculation finalement très simple : les marchés expriment leur méfiance à l’égard de pays trop endettés (en raison , le plus souvent, il faut le rappeler, de leur soutien aux banques en crise), les taux de ces titres augmentent d’une manière insupportable et le déficit public de ces États se creuse un peu plus. D’autant que la seule recette imposée par les mêmes marchés est l’austérité qui provoque la récession et amplifie encore la crise. Il existe pourtant une solution simple, elle aussi : si la BCE se décide enfin à acheter massivement et durablement les titres de la dette souveraine, elle met immédiatement fin aux manœuvres des spéculateurs. Elle seule peut le faire puisque depuis la création de la monnaie unique, elle seule peut battre monnaie et cela, d’une manière illimitée. Les États-Unis, la Grande-Bretagne et le Japon ne font pas autre chose et leurs taux d’intérêt n’ont rien à avoir avec ceux de la zone euro alors que leur bilan économique global n’est certainement pas plus brillant.
Mais voilà, la BCE s’obstine. Elle refuse d’abandonner sa politique de lutte contre l’inflation qui pourtant ne menace pas gravement des économies déprimées, même en cas d’émission importante de monnaie. Mais l’Allemagne n’entend pas que la BCE déroge à cette mission obsolète et destructrice. L’Allemagne joue avec le feu. Cette vision purement idéologique de l’économie risque d’être lourde de conséquences. Car la catastrophe qui s’annonce avec l’appauvrissement des États et des peuples entrainera aussi des replis nationalistes aux conséquences que l’on ne mesure pas.