«Libéral et socialiste»: polémique ou débat ?

En se déclarant à la fois « libéral et socialiste », Bertrand Delanoé a soulevé une polémique qui tout en étant tactique et circonstancielle mériterait un vrai débat au sein du PS français et même plus largement dans une famille sociale démocrate européenne à la recherche de son identité. Le Maire de Paris se positionne comme futur candidat à la direction du PS en attendant une candidature à la candidature présidentielle. Il a donc besoin de se trouver des points d’opposition vis-à-vis de sa rivale Ségolène Royale dont il est pourtant proche idéologiquement mais à qui il ne peut abandonner le monopole de la modernité rénovatrice.

Du coup, d’ailleurs, la dite Ségolène Royale joue à front renversé dénonçant un virage à droite de son concurrent potentiel contredisant du même coup toute sa propre campagne présidentielle de 2007.

Bref, l’esquisse de débat idéologique risque bien de se transformer une nouvelle fois en affrontements personnels. La profonde crise d’identité et de crédibilité du PS français exigerait pourtant une réflexion d’une autre ampleur. Car la proposition « libéral et socialiste » soulève de vraies questions pour la gauche française et européenne. Nécessité d’abord de s’entendre sur les mots : libérale sur le plan politique, elle l’est depuis des lunes, sinon de toute éternité. Et sur le plan économique, bien qu’ayant le plus souvent troqué l’anticapitalisme contre l’antilibéralisme, l’économie de marché fait partie de sa réalité même si elle s’accompagne théoriquement d’une volonté de régulation et si elle ne se confond pas avec la « société de marché ».

Et de toute manière, les rapports de forces actuels et les pratiques gouvernementales de la gauche européenne s’apparentent largement, de gré ou de force, et avec des accents divers, à une forme de social libéralisme. Au-delà des questions de programme et de participation gouvernementale, aujourd’hui pressantes, la question se pose également pour le PS en Belgique. Ici comme ailleurs, si elle veut retrouver à la fois un sens fort et un réel pouvoir, la gauche a besoin d’ouvrir un chantier sans tabou sur son identité idéologique. « Gauche de gauche », gauche libérale, force d’alternance ou d’alternative : malgré la pression de l’actualité et les échéances électorales, le temps du débat n’est pas un luxe mais une exigence vitale.

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