C’était déjà dit à demi-mots. L’injonction européenne de la semaine dernière n’a fait que le confirmer. Le budget fédéral – en attendant les rabotages régionaux – comprendra d’ici peu de nouvelles coupes au nom des critères absurdes et suicidaires imposés par l’idéologie de l’austérité qui habitent littéralement l’Europe.
2012, sera bel et bien l’année de l’austérité pure et dure, d’une austérité qui nulle part ne se départit de sa base inégalitaire quand elle ne la renforce pas. Car globalement, tous sacrifices et charges confondus, une fois encore les revenus du travail ou les allocations sociales sont durement mis à contribution alors que les revenus mobiliers ou financiers s’en sortent plutôt bien.
Si cette chronique se fait régulièrement l’écho des critiques émises par les plus éminents économistes à propos de cette obsession de l’austérité qui nous conduit tout droit à la récession, il convient d’ajouter, naturellement, que la question des déficits publics ne peut être ignorée pour autant et que, d’une certaine manière, l’austérité peut aussi être un facteur de changement. Ce qui n’est évidemment pas le cas dans les différents programmes socio-économiques européens. Car s’il existe bien une « autre austérité », instrument possible pour une transformation de la société, les conditions n’en sont pas réunies, ni chez nous, ni ailleurs.
L’autre austérité selon Berlinguer
Je me permets de rappeler ici un discours auquel j’ai déjà fait allusion en d’autres temps. Il s’agit du discours sur l’austérité prononcée en 1977 – il y a 35 ans ! – par Enrico Berlinguer, qui était à l’époque secrétaire général d’un PCI au faite de sa puissance. « L’austérité, disait Berlinguer, n’est pas un simple instrument de politique auquel il faudrait recourir pour surmonter une difficulté temporaire, conjoncturelle, pour permettre la reprise et la restauration des vieux mécanismes économiques et sociaux. Ça, disait alors Berlinguer, c’est la manière dont l’austérité est conçue et présentée par les groupes dominants et par les forces politiques conservatrices. Mais ce n’est pas cela pour nous. Pour nous, l’austérité est un moyen de contester jusqu’aux racines un système qui est entré dans une crise structurelle, une crise de fond, (…) le moyen de dépasser un mécanisme dont les caractéristiques sont le gaspillage, le gâchis, l’exaltation des particularismes et de l’individualisme les plus effrénés, de la consommation la plus folle. »
Ces lignes ont gardé toute leur force et leur pertinence si l’on veut, en quelque sorte, retourner l’austérité pour donner la priorité absolue aux besoins collectifs et allier une fiscalité égalitaire au développement durable. Autant d’objectifs absents des politiques actuelles.