Après l’affrontement politique, c’est la bataille de la communication qui fait rage. Entre les libéraux qui rappellent que « pas une virgule n’a été changé dans le traité » et le PS qui matraque sur le thème du « nouveau Ceta », il s’agit naturellement d’imprimer sa marque et d’imposer dans l’opinion la figure du vainqueur. On ne tranchera pas ici la question de savoir où il faut exactement placer le curseur entre les « avancées significatives » et la « capitulation » en rase campagne. On notera cependant que les fameuses avancées sont essentiellement des promesses ou des rappels de principes généraux et que si l’engagement est pris de demander à la Cour européenne de justice de vérifier la compatibilité du mécanisme d’arbitrage avec les traités européens, le dit mécanisme est conservé. Des « zones d’ombre subsistent » disait le très modéré commentaire du CNCD. A tout le moins…
On peut par contre s’interroger avec pertinence sur la « formidable avancée démocratique » revendiquée par Paul Magnette devant le parlement wallon. Bien évidemment le débat sur le CETA a été un moment démocratique de forte intensité [[On l’a souligné ici : voir le Blog-Notes du 22 octobre « Mais si, Cher Paul M., il s’agit bien d’une victoire »]] On ne le répètera jamais assez : la qualité du débat parlementaire, la mobilisation associative et le retour d’un certain volontarisme politique ont enchanté la vie publique…pendant quelque jours. Et le contraste est dès lors encore plus saisissant et plus choquant quand on voit comment Paul Magnette et sa majorité ont adopté en quelques heures un texte dont il affirmait, la veille encore, que l’étude d’éventuelles modifications prendrait des jours et des semaines. En un coup, un seul, un traité qui était considéré comme inacceptable est devenu « le modèle » indépassable. Et là, en une fois, la résistance se transformait en coup politique.
On pouvait estimer que le rapport de force ne permettait pas d’aller plus loin. C’est évidemment discutable mais pas illégitime de le penser. Mais le respect de « la formidable avancée démocratique » exigeait que cela soit expliqué et débattu devant les parlementaires et les citoyens. Avec clarté et modestie, avec le souci de la pédagogie politique qui a régné durant la « parenthèse wallonne ». Au lieu de cela, la nouvelle star – et son parti – ont choisi le triomphalisme dont les plus éclairés des commentateurs estiment qu’il n’a pas lieu d’être. Profitant d’une aura au firmament, le ministre président aurait pu expliquer que l’issue provisoire de l’affrontement imposait des concessions et que faute d’alliés (où était la gauche européenne ?), la bataille serait encore longue mais que des jalons majeurs avaient été tracés. Cela aurait permis de maintenir la mobilisation et de ne pas provoquer l‘amertume et la déception.
C’était en tous cas, le pari qu’exigeait le respect du citoyen. Paul Magnette n’a pas eu cette volonté, cette clairvoyance ou ce courage. Et le PS en manque cruel de cheval de bataille a transformé un combat exemplaire en une vulgaire stratégie de communication. Certes, Magnette a toujours proclamé sa foi dans le libre échangisme et son parti porte une politique sociale libérale depuis plusieurs décennies. De ce point de vue il n’y a pas de surprise. Mais incarner une résistance qui vous dépasse permet parfois de transcender un dessein politique. La lutte contre cette Europe du Ceta ou du Tttip ne s’arrête évidemment pas. Mais l’occasion de lui donner une nouvelle dimension a été manquée. Et de ce point de vue « Non, Cher Paul M., ce n’est pas une « formidable avancée démocratique ».