C’est un tournant dans l’histoire de l’Union Européenne. Pour la première fois, la Commission a été élue avec les voix de l’extrême-droite, celles des Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni (groupe ECR-Conservateurs et Réformistes Européens).[1] Jamais l’Union n’avait connu une Commission aussi à droite dominée par le PPE (14 commissaires sur 27) qui désormais fixe les règles du jeu en s’alliant selon les circonstances et les sujets avec ses partenaires officiels socialistes (S&D) et libéraux (Renew) parfois secondés par les Verts ou avec l’extrême droite de différentes tendances et appartenances. On l’a vu récemment quand cette dernière alliance « alternative » a voté un moratoire sur les règles de déforestation prévues dans le Green Deal. Manfred Weber, le très droitier chef du PPE, est désormais le faiseur de rois et il revendique même haut et fort ces alliances à géométrie variable. Mais, de fait, la reine de l’Union est bien Giorgia Meloni. Depuis deux ans elle s’est étroitement associée à Ursula von der Leyen qui lui a délivré ses lettres de noblesse européenne en échange d’un soutien très utile en cas de défection dans sa majorité « officielle ». Meloni, on l’a vu[2], a d’ores et déjà imposé sa politique migratoire à l’ensemble des 27 avec en perspective l’externalisation des procédures de demande d’asile. Mais plus fondamentalement encore, son objectif politique déclaré depuis son arrivée au pouvoir en 2022, l’alliance structurelle entre la droite traditionnelle et l’extrême-droite, est en train de se concrétiser au niveau européen avec la complicité des démocrates-chrétiens du PPE. Que les Libéraux de Renew ne s’en soucient guère n’est pas étonnant au vu de leur droitisation de plus en plus radicale, mais que les Socialistes (en dépit de voix contraires isolées), et accessoirement les Verts, ne réagissent pas plus vigoureusement à ce glissement idéologique sans précédent dans l’histoire communautaire en dit long sur leur résignation.
Giorgia Meloni peut triompher. En juillet dernier, elle s’était payé le luxe de voter contre la réélection de son amie Ursula notamment en raison du maintien d’un Green Deal aux ambitions pourtant redimensionnées. Les observateurs avaient alors parlé d’une défaite pour Meloni et pour l’Italie qui allait perdre — disait-on- du poids au sein de la Commission. Erreur fondamentale : avec l’élection de son proche Raffaele Fitto comme vice-président en charge du domaine essentiel des fonds de cohésion et du plan de relance, son influence sort largement grandie de l’épreuve. Le marchandage laborieux dans la désignation des commissaires a permis cette manœuvre à laquelle ont participé l’ensemble des groupes traditionnels de la droite, du centre et centre-gauche (avec certes des rebuffades individuelles). Symboliquement — et idéologiquement —, Meloni siège désormais à la droite de von der Leyen avec la bénédiction du PPE. Cela annonce une diplomatie guerrière, un retour en arrière sur le plan de la transition écologique, et une nouvelle version de l’austérité budgétaire. Jamais l’Europe n’aura été aussi à droite. Et c’est pourtant dans ce contexte et ce rapport de force que Philippe Lamberts qui a coprésidé durant dix ans le groupe des Verts/ALE au Parlement a choisi de devenir le conseiller d’Ursula von der Leyen qu’il avait qualifiée l’an passé de « la plus grande Commissaire Européenne depuis Jacques Delors ». Il est des fins de carrière pathétiques.
[1] Les lecteurs habituels de ce Blog-Notes ne s’en étonneront pas. Depuis deux ans j’insiste sur le rôle central de Meloni et de sa stratégie européenne gagnante.
[2] Voir : https://leblognotesdehugueslepaige.be/politique-migratoire-le-triomphe-de-meloni/
Très bonne analyse cher Hugues
Lamberts a ete l’ architecte de l’obstruction parlementaire contre ce qu’on a commencé à appeler » les normes budgetaires de Gand », vue leur approvation á Gand au sommet des ministres de finances et les banquiers centraux de la zone euro le 10 fevrier dernier.
https://facebook.com/events/s/choisir-lavenir-ou-lausterite-/304199062458219/
Juste comme l’ apogee de Meloni est le resultat des luttes politiques nationaux en front commun nationaliste economique de soumission au tutelle UE pour sauver la haute finance Italien et donc l’euro, la nouvelle positionnement VDL est le resultat des absences de fronts communs nationaux anti-austeritaires.
Ce n’est pas au hasard que c’ est juste en Wallonie que les trois partis contre les normes de Gand ( PS, Ecolo, PTB) ont perdus des voix , ouvrant le pavé á Bouchez qui est en train de former un gouvernement avec De Wever …sur base des normes de Gand.
Le perte de la majorité de gauche en Wallonie se paie cher dans le cadre de la structure complexe de l’ Etat belge évitant toute résistance politique- institutionel sous pression de la vigilence citoyen , comme on a vu encore dans le fameux » affaire CETA « , quand la région de la Wallonie a utilisé son droit fondamental pour faire contrôler le CETA á nos droits fondamentaux, notamment sur base du sujet des tribunaux d’arbitrage.
Ces trois partis de gauche actuellement n’ont pas ue ni la lucidité. ni le courage politique pour redescendre leur alliance anti-austéritaire au PE vers le niveau national, régional et local et sont tout les trois responsables pour l’apogée de Bouchez.
L’ opportunisme de Lamberts dans la désignation de la commision VDL ne peut pas masquer la nécessité de débat politique sur tant de succès que des regressions de la gauche en generale.
Dans les nogeciations des coalitions regionaux et locaux aucun position de ligne rouge a été formulé pour faire front aux mesures budgetaires et de » reformes » imposés aux communes et aux entités federés par des engagements supra-nationaux que la Belgique a pris en charge, même pendant la pandémie en Belgique comme en Italie avec l’aval de tous les partis politiques, de l’extrème gauche á l’ extrème droite, ouvrant en toute negligence opportuniste ou en toute conscience contre’reformatoire, la voie des » réformes » des pensions, du marché de travail , des privatisations et des engagements geopolitiques qui nous mènent au réarmement Européen.
Selon le bourmestre de Mons par exemple, les trois partis politique de gauche qui forment le collège, ont consciemment désisté toute reference aux normes de Gand, fait opportuniste partidaire qui sape immédiatement le coup politique monté par la banque d’ Etat Belfius á refuser l’emprunt demandé par la région par la région.
Notamment se pose le problème politique démocratique fondamental de l’ utilisation de la subsidiarité ancré et bien dans la constitution et dans le Traité UE, principe de fonctionnement de base de la concertation social et de la relation entee la societe civil et la politique belge, comme instrument de contrôle constitutionel pour bloquer l’austerité et toute » engagement géopolitique ».
il est très facile de regresser vers un pattriotisme de parti, donnant coupabilité aux autres partis ou concurrents politique, aux lieu du pattriotisme constitutionelle á travers toute politique démocratique se passe pour donner primauté á l’intérêt general et l’ intérêts des citoyens, des travailleurs, fermiers et allocateurs sociaux, jeune et vieux.
Avec une plainte devant le Tribunal de l’Union Européen, des citoyen Gantois se sont mis en résistance contre les normes de Gand.
Toute citoyen, toute mouvement. toute syndicat ou parti politique peut se mettre parti intervenant dans cet affaire.
Prenez contacte
rafverbeke1956@gmail.com
http://www.grondrecht2024.be
Comme toujours, analyse très pertinente. J’opine particulière sur le passage concernant Philippe Lamberts qui se met au service de la présidente libérale de la Commission. Sidérant.
A part ddans les dictatures,un conseiller n’est pas nécessairement “au service” de celle qui l’a embauché.
Il existe des hommes et des femmes libres:Lamberts est un homme politique averti,
Gardons-nous de procés d’intention,et attendons de voir.Il sera toujours temps de le vouer aux gémonies, ou …de le lapider publiquement rond-point Schuman .
Désolé mais dans tous les pays du monde être conseiller du Prince implique une adhésion à son projet. Il n’existe pas des « conseillers d’opposition ». Ce sont le circonstances du choix de Lamberts qui interpellent : rejoindre von der Leyen qui a mis a mal le Green Deal et s’allie avec Meloni et l’extrême droite n’est pas compréhensible en dehors d’une trajectoire personnelle.
Je suis complètement d’accord sur le fait qu’il s’agit d’un tournant pour l’Union européenne, avec une nouvelle commission qui est aux antipodes des ambitions d’intégration de Jacques Delors. Cette commission est surtout la moins bien élue de toute l’histoire européenne, seulement 370 voix de confiance face à 318 votes de défiance (282 contre ou 36 abstentions).
Von der Leyen ne vise d’ailleurs ouvertement plus le consensus, mais entend passer par des majorités alternatives reposant sur la droite ou la droite de la droite, que ce soit sur des sujets comme défense ou la politique de sécurité notamment, mais aussi pour les questions de commerce international (en connivence d’ailleurs plus avec Lagarde qu’avec Meloni).
Il y a clairement un fossé entre la majorité qui a voté sa reconduction à la tête de la Commission et la représentation politique reflétée par les attributions des postes clés. La présence à la vice-présidence de l’exécutif d’un post-fasciste, le très melonien Raffaele Fitto, est un affront assumé d’abord envers les sociaux-démocrates mais aussi pour les libéraux de Renew et même certains chrétiens-démocrates du Parti populaire européen (PPE). Ce dernier groupe a désormais les coudées franches pour des alliances à géométries variables avec le groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR), et aussi potentiellement avec les Patriotes pour l’Europe et l’Europe des nations souveraines.
Dans un récent discours, von der Leyen a parlé de la nécessité d’une « boussole » pour garantir la compétitivité européenne, relancer les investissements et orienter l’épargne. Cette boussole serait d’autant plus nécessaire pour le modèle démocratique européen, particulièrement mis à mal, et la défense de sa spécificité sociale et culturelle.
Le positionnement de von der Leyen en faveur d’une Commission élastique impliquera inévitablement des nouvelles orientations d’austérité budgétaire, au regard des priorités qui seront accordées à la défense (et à ses fournitures de matériel américain).
Dans le nouveau contexte qui se profile, il sera encore plus indispensable de définir des stratégies à caractère strictement politique sur l’avenir du modèle européen. Il est à espérer que ce rôle puisse être porté par le nouveau Président du Conseil, Antonio Costa, à partir de convergences supra-nationales dans certains secteurs-clés, au-delà de la seule défense. A l’instar de ce que préconise le rapport d’Enrico Letta, pour engager des investissements communs, qui garantissent la réindustrialisation (propre), la mobilité intégrée, la transition écologique et technologique.
A l’Europe de la défense et du repli, le camp progressiste devrait s’atteler à projet commun qui garantisse l’innovation et l’éducation en dehors du marché privé, et qui garantisse pour sa cohésion le soutien à ses régions défavorisées.