Un député UMP a demandé la constitution d’une enquête parlementaire pour faire toute la lumière sur le fiasco du foot français. Après sa leçon de morale, la ministre des sports a fait pleurer les Bleus –leur a-t-elle aussi donné la fessée ? Un manque intolérable de transparence de l’information ne nous permet pas de le confirmer ! Sans oublier le président de la République qui intervient depuis Saint Petersbourg pour ensuite convoquer des Etats Généraux du football. Sans négliger les« finkelkrauteries» et autres considérations discriminatoires sur l’origine des joueurs de l’équipe de France. Plus que les péripéties elles-mêmes, ce sont les commentaires et les prises de position qu’elles suscitent qui donnent la dimension ubuesque de ce psychodrame à la française.
Mais attention, ces délires ne sont pas tous innocents. Certes l’organisation, le statut et la santé du sport parlent – comme on dit- de l’état d’une société. Le sport comme reflet et souvent comme caricature des valeurs dominantes, c’est une vérité de tout temps, de l’antiquité au XXIe siècle. Mais l’ère du sarkoberlusconisme qui cultive la confusion des genres et intègre avec soin le sport et les sportifs dans les tactiques politiciennes est particulièrement sensible aux variations des performances et à l’exploitation des icônes sportives. Infine, c’est la politique qui est construite sur le modèle de l’entreprise sportive, assimilant son vocabulaire et surexploitant ses performances et du même coup subissant le prix des défaites.
La surdimension médiatique et politique du sport a d’autres conséquences. Pendant que la France entière pleure ses Bleus à l’âme, un réforme particulièrement injuste des retraites est à l’œuvre – on manifeste partout aujourd’hui en France-, une affaire impliquant la 3eme fortune de l’hexagone et un ministre livre ses petits secrets et ses grandes fraudes sur fond de conflit d’intérêt, et sous la pression de l’interventionnisme présidentiel- encore !- le plus grand quotidien français, Le Monde, va changer de main et voit son indépendance un peu plus menacée. En guise de miroir grimaçant, Radio France dont le PDG est nommé directement par Nicolas Sarkozy licencie ses humoristes iconoclastes. Le désastre sportif reflète et occulte en même temps toutes les autres crises.