L’idée de ce film est né en juillet 2006, quand Alain de Halleux, réalisateur qui a aussi fait des études de chimiste nucléaire, entend à la radio qu’une centrale a failli exploser en Suède. A quelques minutes près, on est passé à côté d’un nouveau Tchernobyl en Europe. A partir de là, de Halleux entreprend une longue enquête qui débouche aujourd’hui sur ce film « R.A.S. Nucléaire, rien à signaler » (production Crescendo films et Iota Production) diffusé ce lundi 27 à 22.25 heures sur la Une (RTBF) et le 12 mai sur Arte.
Ce n’est pas un film « pour ou contre le nucléaire » mais nous dit, le réalisateur, il s’agit « d’examiner les conditions dans laquelle l’industrie nucléaire opère aujourd’hui: passée d’une philosophie de service public à celle des contingences économiques de la libération du marché de l’énergie, le financement et la marge bénéficiaire règnent et riment avec sous-traitance et réduction de la sécurité. Les travailleurs du nucléaire rencontrés en France et en Europe s’inquiètent : on est passé d’un risque zéro à un risque
calculé ! »
L’axe choisi est fondamental : comment la sous-traitance et l’aggravation des conditions de travail ont abouti à un sérieux recul de la sécurité dans le nucléaire. « RAS », c’est bien ce qu’un contrôleur du nucléaire est poussé à inscrire dans son rapport alors qu’il a constaté une fissure grave dans la cube d’un réacteur. On le verra dans le film : pour différentes raisons, la pression est immense. Elle va jusqu’au licenciement pour ceux qui brisent le mur du silence sur les questions de sécurité.
Le documentaire d’ Alain de Halleux est un formidable film de rencontres. Le réalisateur a une grande capacité d’écoute et un respect immense pour ceux qu’il filme. Ces « invisibles », ces hommes et ces femmes qui ont cru dans le nucléaire et qui sont quasi amoureux de leur métier, sont aujourd’hui les témoins – et les accusateurs- lucides et courageux de l’état du nucléaire dans nos pays. La force de leur parole est impressionnante : elle fait la richesse d’un film qui doit être vu le plus largement possible. Un film citoyen d’un cinéaste qui revendique « d’utiliser sa caméra comme une loupe qui peut regarder le monde ». Et dans « RAS » cette loupe nous brûle !