Au 20e jour de la guerre totale menée par Israël dans la bande de Gaza, alors que l’horreur se banalise et recule déjà dans le sommaire des informations, des mots font florès. « Malaise » ou « symétrique », voilà les paroles qui émergent dans certains commentaires ou appels. « Malaise » d’abord. Il ne s’agit pas ici des événements eux-mêmes mais de leurs conséquences et des réactions qu’ils provoquent.
Dans les milieux laïcs notamment, on s’inquiète – ou parfois on dénonce avec plus ou moins de virulence – la main mise du fondamentalisme musulman sur les mouvements de solidarité avec la cause palestinienne, on évoque aussi les risques d’importation du conflit avec ses dérives communautaires ou ethniques. Il est évidemment légitime et même indispensable de réagir à de telles dérives et en premier lieu, bien sûr, à des manifestations d’antisémitisme. Mais pour combattre utilement ces venins, il y a lieu de s’interroger sur leurs origines, et d’inscrire ce combat au sein même de la solidarité avec les souffrances d’un peuple que partage aujourd’hui une part de plus en plus importante de notre opinion publique quelle que soit son origine. L’importation du conflit du Proche Orient semblait moins gêner lorsque l’opinion était massivement pro-israélienne. Il ne faudrait pas que le « malaise » en vienne à occulter les responsabilités fondamentales de la tragédie palestinienne.
Cela nous mène au mot « symétrique » souvent d’ailleurs lié au « malaise ». Là aussi des textes apparaissent qui exigent que l’on traite les parties avec équidistance ou symétrie. Tout le monde sait que seules la reconnaissance mutuelle et la création de deux états peuvent garantir la paix et la sécurité aux deux peuples. Mais demander aujourd’hui aux Palestiniens écrasés sous les bombes israéliennes de faire des concessions de principe semble d’une hypocrisie absolue. D’autant que depuis quinze ans, les gouvernements israéliens n’ont eu de cesse que d’affaiblir le camp palestinien la de la paix. Souvent les plaidoyers pour l’équidistance masquent mal une position unilatérale. En début de semaine, des universitaires francophones et néerlandophones demandaient, eux, aux autorités belges et de l’union européenne « de se départir de leur posture dite « équidistante », en rappelant que le conflit n’oppose pas deux parties équivalentes mais un occupant et un occupé, et ce, quels que soient les agissements de certains groupes palestiniens ».Cette confusion entre occupants et occupés provoque, elle aussi un « malaise », comme on dit, mais d’une autre dimension.