Certes, les juges suprêmes italiens ont invalidé ce mercredi l’immunité juridique du président du Conseil italien. Pour rappel, Berlusconi s’était offert une loi sur mesure qui le mettait à l’abri de toute poursuite durant la durée de son mandat, loi qu’avait préparé et fait voter dans la précipitation son ministre de la justice ( Ligue du Nord) en juillet 2008. La plainte de magistrats qui avaient été obligés de suspendre des poursuites pour corruption contre le chef de l’exécutif a eu raison de l’auto-immunité berlusconienne. Ce n’était pas acquis mais 9 des 15 juges de la Cour Constitutionnelle ont donc estimé que cette disposition violait le principe d’égalité des citoyens devant la loi. Immédiatement les lieutenants du premier ministre se sont déchainés contre des juges une fois de plus accusés de complot politique au service de la gauche mais aussi contre Giorgio Napolitano, le Président de la République qui nomme les magistrats de l’instance suprême. Ses alliés et ses amis s’en prenant au passé « « communiste » du chef de l’Etat . Berlusconi lui-même mettant directement en cause le Président de la République au risque de provoquer une grave crise institutionnelle.
Certes, Silvio Berlusconi est embarrassé : il risque de voir rapidement se rouvrir trois procès en corruption. Et cela, alors que sa holding familiale, la « Fininvest » vient d’être condamnée à verser 750 millions d’euros de dédommagement à son vieil adversaires, Carlo De Benedetti dans l’affaire du rachat contesté dans les années 80, de la Mondadori, l’une des principales maisons d’édition de la péninsule. Le Cavaliere se serait bien passé de cette nouvelle menace judiciaire qui peut entraîner des condamnations encore bien plus sérieuses. Mais il n’est pas certain que son avenir politique en soit gravement compromis.
Certes ces affaires judiciaires (corruptions, fraudes diverses, pots de vins) s’ajoutent aux frasques de sa vie privée qui ont défrayé la chronique et sont sans doute plus embarrassantes pour le chef du gouvernement mais la prudence est de mise.
Mercredi soir Berlusconi intervenait (par téléphone) dans « son » émission sur RAI Uno, le fameux « Porta a Porta » de son ami Bruno Vespa. La hargne et la grogne berlusconienne, accompagnés d’insultes à l’égard de l’opposition, étaient sans limite. Et l’animateur le plus berlusconien du service public organisait véritablement le chaos sur son propre plateau de façon à ce qu’aucun intervenant de l’opposition ne puisse être entendu.
Le berlusconisme a tellement imprégné la plus grande partie de la société italienne qu’il peut encore en sortir indemne. La fraude, l’anti-étatisme qu’il incarne – et qu’il revendique avec tant d’assurance et d’arrogance- ne sont pas nécessairement des repoussoirs pour une large part du peuple italien qui se reconnaît dans les « valeurs berlusconiennes » du triomphe de l’individualisme poussé à son extrême. La faiblesse historique de l’état italien et l’incontestable domination idéologique que le berlusconisme exerce sur la société italienne notamment mais pas seulement grâce a sa maitrise des médias) ne permettent pas de mesurer quel sera l’impact réel de ce dernier épisode juridique. Mais fondamentalement on peut craindre que décidément le berlusconisme ne soit pas soluble dans la justice.