En bon élève européen, la Belgique continue de s’inscrire dans la politique drastique de réduction du déficit budgétaire à moins de 3% du PIB. On sait que le gouvernement fédéral a encore réduit les dépenses publiques de quelques 811 millions d’euros pour 2012 et qu’il devra trouver 3,7 milliards en 2013. On sera alors au cœur de l’austérité : de nouvelles réductions de dépenses toucheront inévitablement à la protection des plus faibles et de nouvelles recettes, si elles ne s’attaquent pas aux plus hauts revenus, affaibliront encore la consommation des ménages et donc l’activité productive.
De nombreux économistes, y compris libéraux, ont beau lancer des cris d’alarme sur les dangers mortels de cette politique. Rien n’y fait. Sous la conduite de la Commission, les gouvernements européens marchent vers le précipice avec une discipline qui donne le vertige. De plus, les politiques d’austérité creuseront encore un peu plus les inégalités. Puisque pour 2013 on évoque chez nous des hausses possibles de la TVA, donc de la fiscalité la plus inégalitaire alors que de nouvelles régularisations fiscales pourraient, de fait, récompenser la fraude. En termes de recettes, des alternatives existent pourtant. Cette semaine dans une Carte Blanche publiée par Le Soir, le chercheur en économie Frédéric Panier plaidait pour ce qu’il indiquait comme une réforme fiscale juste et efficace, à savoir la taxation des plus values. En Belgique les plus values en capital ne sont pratiquement pas taxées au contraire des dividendes ou des intérêts. Pour rappel, une plus value en capital est le bénéfice réalisé lors de la revente d’un actif (comme une action) à un prix supérieur à son prix d’achat. Il s’agit là d’une aberration de notre système fiscal, souligne Frédéric Panier. La non taxation des plus values est à la fois profondément injuste et profondément inefficace, ajoute-t-il. Injuste parce que la seule source de revenu qui échappe à presque tout impôt est celle qui est la plus concentrée dans les grandes fortunes.
Et pour répondre aux angoissés de la rage taxatoire, il ne s’agit pas d’ajouter un impôt supplémentaire, mais tout simplement de mieux répartir la charge fiscale entre tous et finalement d’améliorer la productivité de notre économie. La proposition de Frédéric Panier n’est pas révolutionnaire. Elle a d’ailleurs déjà été mise en avant par d’autres, des syndicats ou Attac. [[Voir aussi le récent dossier de la revue Politique ( n° 74) « Paradis fiscal : le Modèle belge »]] Cette proposition est simplement frappée au sceau du bon sens. Elle exige, il est vrai, une certaine volonté politique et la capacité dans le rapport de force actuel d’imposer une vision plus progressiste de la fiscalité. Pas simple, reconnaissons-le. Mais l’enjeu est essentiel.