Les sardines ouvrent le champ du politique

Samedi à Rome, un mois après leur apparition impromptue à Bologne, les sardines ont fait le « plein » sur la place San Giovanni. Le mouvement est toujours ascendant : plusieurs dizaines de milliers de manifestants dont la diversité demeure l’identité, mais à travers l’affirmation de principes intangibles : l’antifascisme, l’antiracisme, le respect de l’autre, le choix de la politique. On chante « Bella Ciao » — l’hymne de la résistance — et parfois celui de la patrie. On défend toujours les principes de la constitution italienne, celle dont le premier article affirme le droit au travail. Samedi, les sardines ont repris la place San Giovanni que Salvini et ses troupes avaient récemment confisquée à la gauche qui y avait toujours célébré ses victoires et ses deuils[1]. Le choix du lieu, comme le défi, était symbolique.

Roma, Piazza San Giovanni le 14 décembre 2019

Dimanche, les 160 coordinateurs des sardines se sont réunis dans un immeuble de Rome occupé par des familles expulsées. Elles et ils ont répété des principes qui fondent le mouvement et dont l’oubli et la négligence ont discrédité la gauche : « écouter les autres, accepter la diversité, présenter des alternatives à la pensée simpliste, être sur les places (le territoire) et sortir du monde digital avec une invitation pressante : “Nous sommes là. Nous y serons toujours. Nous ne nous laissez pas seuls. Nous ne nous vous laisserons pas seuls”.[2] En quelque sorte, la solidarité…

Bien entendu, les échéances politiques sont présentes que le peuple des sardines ne peut ignorer. En particulier celle des élections régionales en Émilie Romagne, le 26 janvier et dont Salvini a fait un défi majeur : conquérir une terre ancestrale de la gauche (communiste essentiellement, dans sa dimension historique). D’autant qu’elles ont motivé les initiateurs du mouvement à Bologne. Une des activistes du mouvement, Grazia de Sario, déclarait après la réunion des sardines : “Nous ne créerons pas un parti. Nous continuerons à remplir les places et à lancer nos messages d’antifascisme, d’antiracisme contre la haine et pour endiguer Salvini. Certainement nous appuierons la gauche, chacun dans sa liberté.[3]

La coordination des sardines

 

Sur la création d’un parti, le sentiment semble général. Sur la manière de se comporter électoralement, le peuple des sardines est certainement plus divisé. Faire barrage à Salvini, implique-t-il, faute l’alternative, de voter pour le centre (gauche) qui a tout fait — ou à peu près — pour ne pas mériter ce vote [4]? D’autant qu’il n’y aura pas d’autre véritable choix. Les sardines renverront sans doute à la conscience de chacun tout en soulignant la priorité de s’opposer à la Lega. Un choix qui pèsera aussi sur l’avenir du mouvement.

[1] Voir : https://www.revuepolitique.be/blog-notes/italie-la-nouvelle-extreme-droite/

[2] Voir : https://www.facebook.com/6000sardine/posts/134173174698456:0

[3] http://www.rainews.it/dl/rainews/media/sardina-grazia-de-sario-15-dicembre-9edb8606-a7c0-4420-a514-6a5abafeca70.html

[4] Même si  personnellement le président de la région, Stefano Bonaccini (PD, mais qui se représentera sous une étiquette plus large) peut se targuer d’un bilan positif largement reconnu.

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2 réponses à Les sardines ouvrent le champ du politique

  1. Anne-Marie Cocula dit :

    Comme j’apprécie ce mouvement qui soumet le parti d’en face, enflé de suffisance, d’arrogance et d’égoïsme, à la dérision…Chapeau les sardines !! Vivement qu’elles viennent boucher le port de Marseille…

  2. Xavier Zeegers-Jourdain dit :

    Les sardines contre les requins. Qui mangera l’autre? Voilà la question ! Je rêve que ce soit les premières, mais que leur victoire ne les transforment pas pour autant en piranhas. C’est souvent le lot des révolutions.

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